L’emploi des boucliers humains en guerre est loin d’être nouveau. Durant la guerre de Sécession, des Commandants fédéraux utilisaient des prisonniers tenus à distance par une longue corde pour inspecter des sites suspectés de contenir des mines ou des torpilles. Au cours de la guerre franco-prussiennes de 1870, les autorités prussiennes donnaient l’ordre de placer des notables français sur les trains utilisés par leurs troupes dans les territoires occupés afin de dissuader les combattants français de les attaquer. Cette pratique des « représailles prophylactiques » a été relancée par les Britanniques et les Boers durant la guerre du même nom. Par exemple, une personne ou un groupe de civils renommés étaient utilisés à l’approche d’un point stratégique (comme un pont) afin de ne pas exposer les troupes au cas où l’endroit aurait été piégé.
Si la tactique a pu être critiquée pour son inhumanité et son illégalité, elle a également été louée, par exemple par le manuel militaire allemand de l’époque, en raison de son efficacité. La pratique a perduré tout au long des guerres du XXème siècle. Ainsi, au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, un tribunal militaire britannique condamnait le général allemand Karl Student pour mauvais traitement sur des prisonniers de guerre ; il les avait utilisés comme bouclier pour l’avancée des troupes paramilitaires allemandes lors de la bataille pour la Crète de 1941. En 1943, un tribunal militaire américain connaissait également un cas de bouclier humain dans l’affaire High Command. En l’espèce, des prisonniers de guerre avaient été utilisés pour protéger les troupes allemandes des bombes à retardements posées par l’ennemi dans des immeubles. Le tribunal concluait que « l’utilisation de prisonniers de guerre comme bouclier pour protéger les troupes est contraire au droit international ». La pratique est loin d’avoir faiblie après la fin de la Guerre Froide. Ainsi, elle est constatée, entre autre, en Irak en 1991, en Somalie en 1993 (§9), au Kosovo en 1999, en Afghanistan, de nouveau en Irak en 2003 (§70), au Sri Lanka en 2009, en Libye en 2011.